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INTERVIEW - SAMIR RAHAL, DIRECTEUR GÉNÉRAL DU GROUPE TERROU-BI : « NOUS SOUHAITONS CONTINUER À NOUS DÉVELOPPER ET NOUS AVONS DEUX PROJETS D'ENVERGURE : UN AU SÉNÉGAL ET UN AUTRE EN CÔTE D'IVOIRE »

Samir Rahal, le fils du fondateur du Resort Terrou-Bi ne manque ni d'idées, ni d'ambition pour prolonger, faire fructifier et pérenniser l'aventure familiale entamée par Kalil, son père.

INTERVIEW - SAMIR RAHAL, DIRECTEUR GÉNÉRAL DU GROUPE TERROU-BI : « NOUS SOUHAITONS CONTINUER À NOUS DÉVELOPPER ET NOUS AVONS DEUX PROJETS D'ENVERGURE : UN AU SÉNÉGAL ET UN AUTRE EN CÔTE D'IVOIRE »

Samir Rahal, le fils du fondateur du Resort Terrou-Bi ne manque ni d'idées, ni d'ambition pour prolonger, faire fructifier et pérenniser l'aventure familiale entamée par Kalil, son père.

Catégorie : Monde - Économie du secteur - Interviews et portraits - Projets hôteliers vRénovation ou nouveauté dans un établissement - Interviews
Interview de Guillaume Chollier le 19-06-2025


Samir Rahal, directeur général du groupe Terrou-Bi, avec son frère Kamil (à droite)

Samir Rahal, directeur général du groupe Terrou-Bi, avec son frère Kamil (à droite)
Crédit photo © Terrou-Bi


Sur les bords de l'Atlantique, loin de la frénésie qui régit Dakar, ses embouteillages, ses vendeurs ambulants ou ses femmes en habit traditionnel coloré, qui rentrent du marché portant leurs provisions en équilibre sur la tête, un havre de paix invite au lâcher-prise. Terrou-Bi est, en effet, une oasis de quiétude, de verdure et de luxe, une bulle de décompression hors de l'agitation locale.

Ce resort, établi sur un terrain de cinq hectares, est le fruit du rêve d'un homme, Kalil Rahal, d'origine libanaise, féru de voyage et tombé amoureux du Sénégal, qui a, peu à peu, transformé cette friche située au bord de la mer en un véritable éden. Son rêve prend vie en 1986, lorsqu'il érige un restaurant en bord de mer qu'il baptise « Terrou-Bi », un terme utilisé par les pêcheurs locaux qui signifie « Terre à l'horizon ». Dix ans plus tard, un casino voit le jour puis, en 2008, en prévision du sommet de l'Organisation de la Coopération Islamique (OCI) qui se tient à Dakar, Kalil Rehal, entre temps rejoint dans l'aventure par ses fils Samir et Kamil, obtient l'autorisation de construire un hôtel de luxe.

Fièrement ancré dans son identité africaine, profitant d'une situation et de prestations exceptionnelles, Terrou-Bi s'est hissé au firmament du luxe à Dakar et est devenu une destination prisée sur la corniche ouest de la ville, séduisant une clientèle variée grâce à l'offre proposée.

Le Journal des Palaces s'est rendu sur place et a rencontré Samir Rehal. Visionnaire comme son père, celui-ci ne manque pas d'ambition. Il nous a présenté ses futurs projets qui permettront à la marque Terrou-Bi de franchir de nouveaux caps dans l'hospitalité de luxe.

Journal des Palaces : Quel est votre parcours ?

Lorsque mon père ouvre le restaurant, mon frère est déjà cuisinier. Moi, je suis encore à l'école. Mon frère s'installe donc derrière les fourneaux. Pour ma part, je quitte l'école en troisième et je pars décrocher un CAP de serveur en France. Au bout de 18 mois, j'abandonne, cela ne me plaisait pas du tout. Je reviens à Dakar. Après six mois, mes parents me renvoient en France, pour passer un CAP de cuisine. Là-bas, j'évolue durant cinq ou six ans dans des restaurants une ou deux étoiles Michelin. Je reviens intégrer l'entreprise, au Sénégal, en 1989, où je travaille durant plusieurs années avec mon frère.

En 1994, mon père, qui en avait fait la demande, décroche une licence de casino. Il n'y avait, à l'époque, qu'un seul casino au Sénégal, à Dakar. Nous ouvrons le nôtre avec 15 machines à sous et 10 tables de jeu.

En 2006, on obtient l'autorisation de construire l'hôtel, que nous ouvrons en 2009, dans le cadre de l'OCI, l'organisation de la conférence islamique, qui se tenait au Sénégal. Le succès a été immédiat : après trois mois d'exploitation, nous avions déjà atteint un taux d'occupation de 80 %. Nous avions un restaurant gastronomique, qui est fermé depuis le Covid, mais que l'on va rouvrir d'ici un an ou deux.

Comment a évolué cet hôtel ?

L'hôtel comptait au départ 112 chambres, en 2008. En 2014, nous avons ouvert des chambres supplémentaires pour arriver à un total de 165 chambres.

Nous avons également construit une base logistique pour pouvoir organiser tous nos flux de livraison à l'extérieur du parking client. Tout ce qui est économat et tout ce qui est nourriture passe là-bas. Cette dernière, par exemple, y est détaillée, débitée, surgelée ou mise au froid. Elle est ensuite envoyée sur les différentes cuisines ou les différents points de vente, prête à l'emploi. Dans cette base logistique, il y a un boucher, un poissonnier, un légumier… Tout y est concentré et nous disposons d'une base de préparation centrale pour les ragoûts, les plats en sauce, les sauces ou les glaces. Nous y avons aussi une pâtisserie, nous faisons nos propres glaces… Nous avons vraiment un bloc de travail extraordinaire. Ensuite, toutes les préparations sont dispersées sur les points de vente.

Mais en 2020, le Covid nous inflige une claque retentissante. Nous sommes au bord du précipice, car nous sommes fermés durant trois mois. Toutefois, nous conservons l'ensemble de nos employés, que nous payons à 70 %, sans aucune aide de l'État. Nous avons dû accueillir des cas contact pour 60 euros par chambre, ce qui n'est rien face à nos frais qui sont énormes.

Comment avez-vous mis à profit cette période ?

Nous avons décidé de refaire le casino de A à Z. Cela nous a donné un souffle par rapport à la concurrence et les six casinos de Dakar. Puis, en sortant de Covid, nous avons fait une introspection et posé une stratégie sur les 10-15 ans à venir. Nous sommes implantés sur le plus beau site de Dakar et nous décidons de le faire évoluer.

Nous avions une splendide salle de gala, dans laquelle nous organisions des banquets de 500, 600 personnes, 800 personnes en plein air, mais aussi des soirées, des galas, etc. Nous décidons de la transformer en salle de réunion. Puis, nous nous sommes focalisés sur l'hôtel en agrandissant les chambres, avec pour objectif de devenir le resort le plus en vue de Dakar, du Sénégal et d'Afrique de l'Ouest en termes de standing, de qualité de service et de qualité d'infrastructure.

Quels sont les atouts de Terrou-Bi ?

Terrou-Bi est une oasis au cœur de Dakar. Nous disposons d'une marina qui nous permet d'accompagner les clients directement à Gorée, une île de la baie de Dakar, classée au patrimoine de l'UNESCO. Gorée est un lieu symbolique de la mémoire de la traite négrière en Afrique. C'est la dernière porte pour les esclaves avant qu'ils ne soient envoyés vers la France ou vers les États-Unis. Nous proposons des transferts privés à partir du resort avec notre bateau. Le client sort de sa chambre, il monte dans le bateau, accompagné d'un guide jusqu'à Gorée, sans avoir besoin d'effectuer un transfert par le port de la ville.

Ensuite, nous sommes cuisiniers de métier. Donc, nous attachons une importance capitale à la fraîcheur, aux produits, au temps d'attente. Quant à notre directeur, David Sierra, il est issu de l'industrie hôtelière de luxe.

Enfin, aujourd'hui, l'attention est portée sur le client. Nous lui vendons de la nuit, du sourire, du service, de l'accueil, du confort. Cela devient notre ADN et cela nous démarque de nos concurrents. Pour cela, nous avons beaucoup investi sur l'humain. Aussi bien en ce qui concerne les cadres, les personnes qui travaillent pour nous, qu'en termes de formation, d'outils que nous mettons à la disposition de nos équipes afin de leur permettre de mieux performer, mieux se comporter, mieux comprendre la problématique client. Et aussi d'être épanouis dans leur travail.

Quel type de clientèle accueillez-vous à Terrou-Bi ?

Jusqu'à présent, nous avions une importante clientèle corporate et d'hommes d'affaires, ce qui représente entre 80 et 85 % de notre fréquentation. Nos clients sont essentiellement des Africains qui viennent de pays limitrophes. Nous accueillons bien entendu beaucoup de Français. Étant donné que le Sénégal possède des gisements de pétrole et de gaz, beaucoup d'anglophones séjournent ici pour leur travail.

Le pays dispose désormais de liaisons aériennes directes avec les États-Unis. De plus en plus d'Américains visitent le Sénégal pour venir découvrir leurs racines. Les Asiatiques – Coréens, Chinois et Japonais – sont plus nombreux qu'auparavant également. Le fait que l'on organise des tournois de poker internationaux au casino contribue à la présence d'une importante clientèle internationale.

Nous commençons désormais à entrer sur le marché de la clientèle de luxe. Pour cela, nous essayons de capter une clientèle loisir partout à travers le monde, pour des séjours de deux, trois ou quatre nuits. Ces clients nous permettent d'accroître la part de leisure.

L'hôtel est en perpétuelle évolution. Des travaux vont prochainement débuter…

En effet, des travaux vont débuter pour rénover le lobby, puis l'étendre côté jardin. Il y a aussi une extension qui est en cours de création. Cela représente un gros investissement, supérieur à 30 millions d'euros.

En quoi consistera cette extension ?

Nous avons, comme nous le disions, un hôtel d'affaires, mais nous disposons d'un cadre balnéaire. Donc, nous avons différentes clientèles qui se croisent. Nous avons décidé de créer cette nouvelle aile, axée business, pour éviter que des visiteurs en costume et des clients loisir, en maillot de bain, ne se croisent. Avec ce nouveau bloc qui comporte 100 nouvelles chambres, nous allons élever le niveau de l'infrastructure et y concentrer les séminaires résidentiels, puisqu'il disposera d'un amphithéâtre de 250 places et de salles de réunion : une plénière, que l'on peut diviser, d'une capacité de 350 personnes, des salles de sous-commission et une autre salle de réunion, qui est un petit peu plus éloignée, à 200 mètres, près de la mer. Grâce à cette nouvelle aile indépendante de l'hôtel principal, nos deux clientèles se croiseront moins.

Ce nouveau bloc axé business va nous permettre, grâce à ses 100 chambres supplémentaires, de renouveler ensuite l'hôtel historique, qui date de 2008. Car, fermer 60 ou 70 chambres dans un hôtel qui en compte 165 pour rénovation, c'est très risqué financièrement. Là, avec 265 chambres, cela nous offre davantage de souplesse. Dans les trois prochaines années, l'objectif est ainsi de refaire à neuf tout le resort Terrou-Bi.

Cette nouvelle aile permet aussi de proposer des chambres plus haut-de-gamme ?

Absolument ! Nous disposerons de deux suites présidentielles de 250 m2 avec des terrasses exceptionnelles. Il y aura aussi six ou sept suites somptueuses avec des terrasses et de très beaux volumes.

Cette aile intègrera enfin deux espaces restauration : un pour les petits-déjeuners individuels et un pour les groupes, où seront servis petits-déjeuners, déjeuners et dîners si besoin.

Ce nouveau bloc devrait être terminé pour juin 2026 et les Jeux Olympiques de la jeunesse, qui seront organisés par Dakar en octobre. Terrou-Bi abritera le centre exécutif du CIO.

Portez-vous d'autres projets, similaires à Terrou-Bi, au Sénégal ou ailleurs ?

En effet, nous souhaitons continuer à nous développer et nous avons deux projets d'envergure : un au Sénégal et un autre en Côte d'Ivoire. Le premier se trouve à Saly, une station balnéaire située à une centaine de kilomètres de Dakar. Sur le terrain du casino que nous y exploitons, nous avons à disposition 5.000 m2 sur lesquels nous souhaiterions construire un hôtel de 60 ou 70 chambres, du même standing que Terrou-Bi. L'idée est de proposer une offre haut-de-gamme, pour nous démarquer. D’autant que, dans le casino, nous possédons certainement le meilleur restaurant de Saly. L’investissement représentera 7 à 8 millions d’euros.

Le second projet serait de créer le même type d'établissement que Terrou-Bi en Côte d'Ivoire, à Abidjan. Nous avons déjà un pied dans cette ville, qui est un hub africain important, au travers d'une autre activité. La difficulté, c'est de trouver un espace qui nous permette de disposer d’une proposition similaire à celle de Dakar. Il n’est pas question pour nous d’investir dans une tour en ville, parce que ce n’est pas notre ADN.

La difficulté à Abidjan, c'est de trouver un espace en bord de mer. Nous souhaiterions nous implanter sur la lagune. L'investissement serait d'ampleur pour cette création, entre 50 et 60 millions d'euros. L'autre difficulté que l'on rencontre aujourd'hui en Afrique, ce sont les crédits. Nous ne pouvons pas emprunter en euros. Il faut donc une banque intermédiaire, qui propose actuellement des taux entre 4 et 5 %, avec un risque de dévaluation qui plane au-dessus de notre tête. Si le franc CFA dévalue, le crédit peut doubler ou tripler. L'autre obstacle lorsque l'on emprunte en local, c'est qu'ici, le long terme, c'est cinq ans, avec deux ans de différé, à 7,5, voire 8 %. Ce n'est pas comme en Europe, où l'on peut emprunter sur 15 ou 20 ans à 2 ou 2,5 %. Dès que l'argent arrive, l'emprunteur commence à payer des intérêts intercalaires. Puis, après deux ans, lorsque l'établissement ouvre, il faut rembourser à la fois les intérêts et le capital. C'est donc très compliqué, car il faut être rentable immédiatement pour pouvoir rembourser.

Terrou-Bi Sénégal Dakar

Le resort Terrou-Bi est situé en bord de mer, à l'écart du tumulte de Dakar
Crédit photo © Terrou-Bi




L'hôtel Terrou-Bi compte 165 chambres. Une extension de 100 chambres supplémentaires est en cours de construction.
Crédit photo © Terrou-Bi



Les chambres de 32 à 121 m2 de superficie sont modernes et confortables. Certaines offrent une vue mer très agréable
Crédit photo © Terrou-Bi



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À propos de l'auteur

Journaliste depuis 20 ans, Guillaume est un inconditionnel des lieux exclusifs où se mêlent confort, qualité de service et gastronomie. Le tout, teinté d’une simplicité et de sourire qui sont l’apanage du luxe ultime.

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