Le Journal des Palaces

< Actualité précédente Actualité suivante >

INTERVIEW - LAURENT DEMOULIN, DIRECTEUR GÉNÉRAL DU THE ST. REGIS LA BAHIA BLANCA RESORT TAMUDA BAY AU MAROC : « CONTRIBUER À LA MONTÉE EN GAMME DE LA DESTINATION »

Le directeur du nouveau flagship du groupe Marriott au Maroc a embrassé le double défi d’une ouverture d’établissement et de l’essor touristique et économique de sa destination

INTERVIEW - LAURENT DEMOULIN, DIRECTEUR GÉNÉRAL DU THE ST. REGIS LA BAHIA BLANCA RESORT TAMUDA BAY AU MAROC : « CONTRIBUER À LA MONTÉE EN GAMME DE LA DESTINATION »

Le directeur du nouveau flagship du groupe Marriott au Maroc a embrassé le double défi d’une ouverture d’établissement et de l’essor touristique et économique de sa destination

Catégorie : Afrique Océan Indien - Maroc - Interviews - - Interviews
Interview réalisé par Vanessa Guerrier-Buisine le 20-10-2023


Issu du lycée d’hôtellerie et de tourisme de Guyancourt, Laurent Demoulin débute sa carrière en passant par tous les étages de l’hôtel Méridien Montparnasse à Paris, se construisant une vision transversale des métiers de l’hôtellerie. Mais, c'est le revenue management qui obtiendra ses faveurs.

Durant plus de sept ans, il monte en compétences au sein du groupe Méridien Hotels & Resorts, pour aboutir au poste de cluster director of revenue development & group sales. Après un passage au sein du groupe Pierre et Vacances, il rejoint IHG Hotels & Resorts pour maximiser les revenus de 150 hôtels dans la région de la grande Chine. C’est au sein du groupe Marriott qu’il décide de poser ses valises en 2012. Un groupe qui lui permet de s’épanouir pleinement, dans le revenue management dans un premier temps, puis en lui confiant sa première mission de directeur général, à l’hôtel Renaissance Paris Nobel Tour Eiffel.

Loin du parcours fléché de l’opérationnel qui devient directeur général d’hôtel, Laurent Demoulin a cultivé son goût pour les performances financières durant une carrière majoritairement tournée vers des missions de revenue manager. Mais, les clichés du revenue manager de bureau sont démontés par l’homme. Fasciné par la qualité de service des hôtels, il brille surtout par une expérience de terrain, à écumer plusieurs pays par semaine, à la rencontre des équipes qui contribuent à remplir les hôtels au quotidien. Un penchant pour le développement des femmes et des hommes de l’hôtellerie qui l’encourage à prendre un virage professionnel.

Laurent Demoulin épouse en avril 2023 sa première mission de directeur général d’un hôtel de luxe signé Marriott. En prenant la tête du St. Regis La Bahia Blanca Resort Tamuda Bay, à quelques encablures de la médina de Tétouan, il adopte un nouveau lieu de vie, et de nouveaux compagnons d’aventure.

Pensé tel un riad privé, ce premier hôtel de luxe au Maroc du groupe américain, jouit d’espaces cultivant un style marocain, tous tournés vers une Méditerranée omniprésente. L’hôtel fait honneur aux codes de la marque St. Regis, avec l’emblématique St. Regis Bar, deux restaurants, un spa, une bibliothèque, 100 clefs, et surtout le service de majordome, signature des hôtels St. Regis, pour une expérience clients d’exception.
Une aventure exaltante, dont le directeur Français a accepté de dresser les contours lors d’un échange avec le Journal des Palaces.

Journal des Palaces : Votre parcours est marqué par une spécialisation en revenue management à l’échelle d’un groupe. Comment passe-t-on de ce type de missions à la direction générale d’un établissement de luxe ?

Laurent Demoulin : En gérant le revenue management, je passais déjà 80% de mon temps sur le terrain, à sillonner trois à quatre pays par semaine. 80% de mon travail était sur l’humain, l’embauche et le développement des équipes.

Au fil de ces années, je rêvais d’un rôle plus large, dans lequel je puisse porter la responsabilité complète de la performance d'un établissement. Je m'intéressais à d'autres sujets comme la performance certes, mais également la qualité de service, la stabilité des équipes, leur engagement dans leur travail, etc.

De plus en plus de leaders régionaux dans leur discipline retournent aux opérations et prennent des postes de directeurs généraux. C’est très classique chez Marriott. Notre président actuel EMEA était comptable dans un hôtel en Autriche au début de sa carrière. Souvent, sur 20, 30, 40 ans, on passe d'un poste de salarié dans un hôtel à un poste de top 10 européen ou mondial.

Avez-vous été accompagné par le groupe Marriott pour prendre ces nouvelles responsabilités ?

Le groupe m'a accompagné avec des plans de développement. Après deux années de préparation, la vice-présidente de l'époque, Gitta Brückmann, m'a proposé un poste de directeur général au sein de l’hôtel Renaissance Paris Nobel Tour Eiffel, avant de pouvoir rejoindre la partie luxe du groupe.

J’ai été retenu au poste de directeur général du St. Regis La Bahia Blanca Resort Tamuda Bay. C’était formidable, car c'était à la fois une ouverture, du resort, que je n’avais pas dirigé auparavant, et c'était à l’étranger. Trois beaux challenges, à relever dans un temps record, car je suis arrivé au mois d’avril, pour une ouverture quatre à cinq mois plus tard.

Il y a des valeurs, des normes, des codes, des étiquettes qui sont différents d'une marque à l'autre. Je suis parti me former au St. Regis à Rome, qui est un hôtel emblématique de la marque, et j'ai intégré également l'académie luxe du groupe Marriott.

Des mentors vous ont-ils accompagné durant votre carrière ?

Deux personnes m'ont beaucoup aidé. Michel Miserez, qui a été mon vice-président des opérations chez Marriott pendant trois ans, m’a fait confiance. Il m'a toujours aidé à réfléchir, à me remettre en cause, sans jugement, et m'a encouragé à prendre le poste.

Le second est Bernard Granier, que j’ai connu alors qu’il était directeur des hôtels de Méridien France. J’étais responsable des ventes groupe au sein des hôtels Méridien à Paris, et la Coupe du monde de football 1998 s’engageait mal. Il m’a alors confié la responsabilité de remplir 2.000 chambres en moins de quatre mois, ce que j’ai plutôt réussi. Bernard Granier m'a alors offert l'opportunité d'être patron du revenu pour les deux hôtels Méridien de Paris. Depuis, il m'a toujours accompagné et m'appelle tous les 15 jours. Je peux lui parler de tout de manière très directe.

Ces amitiés de long terme sont très importantes pour moi.

Quels objectifs vous ont été fixés dans le cadre de votre nomination au St. Regis La Bahia Blanca Resort ?

Nous avons l'ambition d'être reconnu comme le plus beau resort de bord de mer au Maroc, et également de contribuer à la montée en gamme de la destination, voulue par Sa Majesté Mohamed VI, qui réside l'été à proximité de l'hôtel. Nous travaillons avec les autorités de la région et avec les autres hôtels, comme le Royal Mansour, qui va aussi ouvrir prochainement.

Notre ambition est aussi de désaisonnaliser la destination, ce qui ne peut être fait qu’avec l’agrandissement des aéroports.

Quelle est votre définition et votre vision de l’hôtellerie de luxe ?

Il s’agit de créer, pour chaque client, une expérience inoubliable, qu'elle soit émotionnelle ou visuelle. Cela est possible grâce à une connaissance approfondie des besoins des clients, d’être capable de les traduire, dans un service attentif et personnalisé. Cela implique de former nos équipes à poser les bonnes questions à l'arrivée.

Quels atouts et expériences particulières différencient votre hôtel des autres de sa catégorie au Maroc ?

Nous avons vraiment créé des expériences qui allient glamour intemporel et esprit d'avant-garde. Nous sommes sur un niveau de service sans compromis. Cela s'appuie notamment sur le service signature St. Regis de majordome, qui prend en charge, coordonne et est l'interlocuteur privilégié de nos clients durant leur séjour.

Ce qui nous différencie aussi, ce sont nos espaces à taille humaine. Tout est chaleureux, il y a de la célérité, du calme. Dès que l’on sort de voiture, lorsque l’on arrive à l’hôtel, on se sent happé par la mer, car, que ce soient les chambres, les salles de réunion, la salle de réception, toutes sont tournées vers la mer.
Par ailleurs, nous avons la plus belle plage de la côte méditerranéenne du Maroc.

Le Maroc a vécu une catastrophe avec le séisme il y a peu, comment manifestez-vous votre soutien ?

Nous avons pris des engagements à la suite du séisme à Marrakech, avec l’ANAPEC, l’agence pour l’emploi locale. Nous allons embaucher des personnes peu ou pas diplômées en cuisine et sur des postes techniques. Nous allons également former les jeunes de 16 ans pendant plusieurs années, pour qu'ils aient un emploi, et qu'ils puissent aider leurs familles.

Le recrutement est-il un défi dans la région ?

Il y a une montée en gamme, mais peu de compétences dans le luxe aujourd'hui. Nous allons travailler avec l’Institut de Technologie Hôtelière et Touristique de Tanger, pour former les personnes dans les années à venir et préparer cette nouvelle génération à travailler dans des hôtels de luxe, en développant les compétences, qu’elles soient linguistiques, ou en termes d’attitude. Il y a une gentillesse extraordinaire chez les Marocains, mais il y a aussi des codes à comprendre et à mettre en œuvre.

Le développement de l’offre dans la région fait passer le contingent de salariés, de 300 personnes l’hiver à quasiment 2.500 l’été. À elle-seule, la gestion du personnel saisonnier est un vrai challenge à relever.

Comment valorisez-vous l’importance de l’humain dans l’hôtellerie ? Quel type de manager êtes-vous ?

Je mets toute mon énergie sur la prise de plaisir, qui doit être partagée avec mes équipes, pour créer une dynamique qui soit positive, que tout le monde se sente reconnu et apprécié.

Je passe du temps sur le terrain, j'essaie d'écouter, de comprendre les problématiques, d'aider mes équipes. J'apprécie le travail d'équipe et je suis plutôt de nature participative. Je suis aussi très exigeant et je m'attends à ce que tout soit parfait.

Vous jouez au tennis à bon niveau. Quelles vertus du sport mettez-vous à profit dans votre vie professionnelle ? Comment encouragez-vous vos propres équipes à se dépasser ?

En sport, on parle de discipline, d'endurance, de persévérance. Cela m’a beaucoup aidé à gérer les périodes difficiles, trouver mon équilibre avec des périodes de récupération, en faisant du sport pour évacuer.

Pour que mes équipes se dépassent, j'essaye de montrer l'exemple et de montrer mon engagement vers eux. Il faut donner pour recevoir et c'est le concept que je tente d'appliquer. Je laisse de l'espace aux équipes, pour qu’elles prennent des initiatives.

Comment avez-vous choisi vos équipes dans le cadre de cette préouverture ?

À mon arrivée, j’ai séjourné dans un hôtel à 30 € la nuit, et j'ai embauché ma DRH deux semaines plus tard. Elle a 30 ans d'expérience dans le luxe au Maroc, nous avons donc acté de trouver nos collaborateurs au Maroc.

Nous avons rapidement trouvé un immeuble à louer et l’avons mis aux normes du groupe Marriott pour loger les salariés. Le 11 juin dernier, lors de notre journée portes ouvertes pour recruter, 450 personnes étaient déjà là dès huit heures du matin, et nous étions dix à ce moment-là pour les recevoir. Des candidats sont venus de Marrakech, ce qui représente 2 jours de bus pour passer 5 à 10 minutes avec chacun d'entre nous.

Nous les avons choisis sur la base d'expériences solides dans le luxe et en mode préouverture. C’est un moment particulier, et il faut avoir envie et être capable de travailler énormément, de gérer la pression et les imprévus. Notre second prérequis était la nécessité de parler français et anglais, a minima, et enfin, leur attitude, leur envie d'apprendre et de prendre des risques.
85% des salariés, qui sont entrés, sont encore présents aujourd’hui.

Que devrait savoir un jeune débutant dans le secteur ou un professionnel français avant d’envisager une mission au Maroc ?

Pour un jeune, c’est plus délicat, notamment de comprendre que les salaires ne sont pas les mêmes ici qu’en Europe. Il faut savoir apprécier la diversité culturelle, rester humble et s'adapter aux autres, pas l'inverse.

Quels sont les conseils que vous donneriez à un jeune qui veut faire carrière dans le secteur de l’hôtellerie de luxe ?

Tout d’abord, il faut bien se former. J'ai fait une école hôtelière et je pense que c'est une bonne école pour apprendre. Faire des stages ou choisir l'apprentissage sont aussi de bons moyens de mettre en pratique ses connaissances, acquises à l'école. Il faut surtout obtenir de l'expérience, en travaillant dans les différents départements, sur un ou plusieurs hôtels, dans le luxe ou non.

Il est également important de parler deux à trois langues étrangères pour se démarquer. Et, je dirais que travailler à l'international et être flexible sur les destinations, sont des atouts, pour grandir rapidement. J’encourage aussi les jeunes à prendre des risques, calculés, sur leur carrière.

Il faut cultiver les contacts avec des professionnels, avoir un bon réseau. Je participe à des conférences, qui sont des moments de rencontre, et donnent accès à des directeurs généraux ou d’autres. Ce sont des conseils que je me suis appliqué à moi-même.

En savoir plus sur...



A propos de l'auteur

Journaliste experte de l’hôtellerie de luxe et inspirée par les femmes et les hommes qui l'incarnent, Vanessa aspire à valoriser et sublimer la beauté et l’élégance des palaces à travers ses écrits. “Dans un palace, la simplicité sert la quête de l’excellence” admire-t-elle.


Vous aimerez aussi lire...







< Actualité précédente Actualité suivante >




Retrouvez-nous sur Facebook Suivez-nous sur LinkedIn Suivez-nous sur Instragram Suivez-nous sur Youtube Flux RSS des actualités



Questions

Bonjour et bienvenue au Journal des Palaces

Vous êtes en charge des relations presse ?
Cliquez ici

Vous êtes candidat ?
Consultez nos questions réponses ici !

Vous êtes recruteur ?
Consultez nos questions réponses ici !